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AGRO FINANCE AFRICA, une entreprise au service des PME agricoles en Afrique

  • Photo du rédacteur: Lys Makima
    Lys Makima
  • 3 févr.
  • 7 min de lecture

Dernière mise à jour : 14 avr.

Michel FOSSAERT est le président d’AGRO FINANCE AFRICA (AFA). Il est également membre du Conseil d’Administration de la WUSME (World Union of Small Medium Entreprises). À travers AFA, Michel FOSSAERT souhaite apporter des solutions de financement aux PME et coopératives africaines, impliquées dans la transformation des produits agricoles.



crédit : Maria Zardoya
crédit : Maria Zardoya

Selon vous, quels sont les plus grands enjeux agricoles en Afrique, depuis ces dernières années ?


« Je pense qu’un des plus grands enjeux actuels serait de sortir les agriculteurs africains du paupérisme agricole dans lequel ils sont plongés depuis des dizaines d’années. Cela est flagrant lorsqu’un agriculteur ne parvient pas à vivre de sa terre ou à trouver de l’argent pour s’acheter des intrants et du matériel pour augmenter la productivité de son installation. »


À votre avis, quels sont les divers éléments pouvant être à l’origine de ce paupérisme ?


« Les raisons sont nombreuses. Selon moi, pendant des dizaines d’années, beaucoup d’États africains n’ont pas pris au sérieux l’agriculture. Lors de la déclaration de Kampala, en janvier 2025, il a bien été dit que l’objectif des « 10 % du budget de l’État alloués à l’agriculture » devrait être concrétisé. Cet objectif n’a été réalisé qu’en partie, ce qui pose un réel problème. Aujourd'hui, avec cette déclaration, il y a sans doute une volonté d'atteindre ces 10 %, mais aussi de faire en sorte qu'en 10 ans, la production en Afrique soit augmentée de 45 %. Pour cela, il faut collecter 100 milliards de dollars. Nous verrons dans quelle mesure cela sera possible… Chez AFA, nous pensons qu'il faut trouver des solutions qui s'appuient sur le privé. Le public ne peut pas tout faire et sur le plan financier, nous le voyons bien. L’État ne va pas décréter la création d’emplois. Ce sont les entrepreneurs qui créent les emplois, et encore plus lorsqu’il s’agit des PME. La formation aussi est cruciale. Elle doit être systématique pour rester à jour et s’actualiser. Il serait intéressant que des formations à destination des petites unités soient mises en place. Il faut jouer sur la productivité à travers une agrégation, c'est-à-dire rassembler les productions pour les amener vers l'unité de transformation. Tout se joue au sein de la chaîne de valeur et la transformation y joue un rôle considérable. L’avenir de l’agriculture est dans l’agrobusiness et l’agroalimentaire. Cela s’explique par le fait qu’il va y avoir une plus grande population au sein des villes, et cette dernière consomme des produits transformés. Aussi, de plus en plus de travailleurs exerceront au sein du secteur formel et obtiendront un bulletin de salaire. Ils gagneront de l’argent et seront donc en mesure de s’offrir des produits transformés. »


Revenons à AFA. Concrètement, quelles solutions apportez-vous ?


« Pendant un an, nous avons longuement réfléchi à ce que nous pouvions faire et, en 2023, nous avons créé AFA. Nous avons étudié au cas par cas ce qui était possible de réaliser dans le secteur de la transformation en Afrique. Aujourd’hui, nous faisons du financement. Actuellement, nous gérons un gros dossier sur la ville de Bouaké en Côte d’Ivoire. Ce projet concerne 650 exploitations agricoles et nous avons la charge de les accompagner vers des unités de transformation (pisciculture, aviculture, héliciculture et maraîchage). Nous finançons des dossiers ne pouvant pas bénéficier de crédits bancaires. Cela survient pour des raisons très simples. La banque n'a pas assez de données sur l'entreprise, celle-ci n'est pas capable d'apporter des garanties, elle détient un apport de fonds insuffisant… Nous faisons donc le tri, avec sérieux et rigueur, pour étudier les dossiers que les banques refuseraient. Nous élaborons tout un processus, que j’appelle « ceintures et bretelles », afin d’arriver à maîtriser la situation sans garanties classiques. Nous ne pouvons pas partir en contentieux comme la banque le ferait. Nous travaillons donc à ce que le projet soit complètement sécurisé, afin que le montant emprunté soit remboursé. Nous avons différentes approches avec un suivi sur environ 5 ans. Il y a notamment la présence d’un Comité de Direction (CODIR), avec l’idée d’aider l’entrepreneur sur des aléas qu’il ne pourrait pas prévoir. Nous lui donnons la possibilité d’assurer son quotidien. Nous intervenons pour réparer des situations, que ce soit à cause de problèmes de recettes, de coût, de marge, etc. Pendant que l’entrepreneur assure son quotidien, nous mettons la PME en bon état, afin qu’elle retrouve sa vitalité. »



crédit : thatselby
crédit : thatselby

Quels sont les critères d’une PME agricole intéressante et finançable par AFA ?


« Premièrement, je précise que nous n’allons pas dans les champs. La mission d’AFA n’est pas vraiment d’assurer le développement des agriculteurs en tant que tels. Toutefois, nous avons développé une structure commençant à se faire connaître. Il s’agit d’Obligation Économique, sous forme d’associations. Il y en a maintenant une dizaine en Afrique. À travers des groupes projets, ces associations peuvent s’intéresser directement aux champs et donc aux fermes, etc. AFA intervient à partir du moment où il y a transformation de produits. Nous travaillons avec du privé, mais en demandant au privé de laisser une place à des producteurs minoritaires obligatoirement. S’il n’y a pas un minimum de partage, ce n’est pas intéressant. Au demeurant, nous travaillons très volontiers avec des coopératives qui ont pour objectif de définir une ligne d’action commune avec nous. Plus précisément, cela nous permet de détecter des membres de la coopérative qui sont volontaires pour accéder au capital d'une unité de transformation. Dans ce cas, il s’agit du même principe. Il faut emprunter de l’argent et le rembourser. Nous agissons pour mettre en place des solutions leur permettant de devenir actionnaires (minoritaires dans un premier temps, mais qui peuvent devenir majoritaires). »



Aujourd'hui, nous parlons beaucoup d'impact social, sociétal et environnemental. Cet élément semble indispensable dans le développement de projets agricoles en Afrique. Quelle est l’approche d’AFA à ce niveau ?


« Nous sommes dans une approche totalement RSE, développement durable et biodiversité. Nous sommes une société coopérative financière qu'on appelle SCIC, c'est-à-dire une Société Coopérative d'Intérêt Collectif, (entreprise à mission). Aussi, nous ne distribuons pas de bénéfices à nos actionnaires. Nous distribuons les honoraires à tous les experts qui travaillent avec nous dans les collèges Agri, Agro, Finances, mais nous ne distribuons pas d’argent aux actionnaires. L’actionnaire qui vient chez nous est complètement dans un modèle RSE. Sur le plan financier, cela est identique. Nous lançons notre premier fonds d'investissement qui s'appelle SOLIPAR (solidarité et participation). Nos objectifs, que nous pourrons mettre dans nos rapports d'activités, c'est de regarder comment nous avons un impact sur le niveau de revenus des personnes auxquelles nous nous adressons et avec lesquelles nous faisons affaires. Nous pourrons évaluer si cela a une incidence sur leur formation ou celle de leurs enfants. Nous souhaitons mesurer si ces personnes ont également une durée de vie allongée. Cette donnée est difficile à quantifier, mais elle nous importe beaucoup. Nous étudions ces 3 indicateurs autour du thème RSE. »


À votre avis, quel rôle peut jouer le leadership dans un premier temps, puis la communication, dans le développement du secteur agricole en Afrique ?


« Globalement, le leadership, c'est important. Assez souvent, l'argent est prêté en fonction d'un certain nombre de documents prévisionnels et de secteurs d'activités dans lesquels nous nous situons. Mais finalement, nous avons affaire à l’entrepreneur. Il nous faut donc tâter l’étoffe, et s’il n’a aucun leadership, c’est un peu difficile. Ensuite, il faut sélectionner les personnes en fonction de leur implication totale dans un projet. Celui qui papillonne en étant à la fois dans l'agriculture, tout en voulant faire de la transformation de produits, mais en même temps il a pour projet de créer une plateforme digitale avec les copains… ça ne me paraît pas être le bon profil. L’entrepreneur est peut-être très intelligent et bien formé, mais cela n’est pas suffisant. Il faut du travail concentré sur un objectif. C’est ce que nous regardons attentivement dans nos dossiers. De plus, je crois que la communication est importante lorsque nous avons un bon produit. Sinon, cela ressemble à de la publicité trompeuse. Je pense que ce produit de qualité peut exister au sein des exploitations agricoles. Et je pense également que cela est plus facile à démontrer au sein des unités de transformation. L’investisseur souhaite savoir s’il y a un risque, si cela est rentable… Il faut communiquer là-dessus. Aujourd'hui, dans la chaîne de valeur, il faut faire ressortir tous les atouts de l'unité de transformation, sans pour autant négliger le secteur des exploitations agricoles qui peuvent très bien être rentables d’un secteur à un autre. Cela demande une certaine expertise, pour réussir à déceler les plus et les moins. Maintenant, que vous dire par rapport aux signes du destin qui font que les récoltes peuvent être mauvaises à un moment, car il y a eu trop d'inondations, trop de sécheresse, trop de ravageurs… Cela est la grande interrogation des 5, 10 années à venir. Il faudrait voir comment, dans le secteur agricole, nous pouvons réussir à encaisser les mauvais coups. C’est pour cela que nous prêchons pour un deuxième revenu, c’est-à-dire la participation qu’ils auront pu prendre dans une unité de transformation. Cela leur permettrait de tenir le coup, de développer de la résilience et de soutenir l’exploitation agricole de l’unité de transformation. En 2024, j’ai assisté à la fermeture de 4 sociétés de transformation de l’anacarde en noix de cajou au Sénégal. Cela a eu lieu à la suite d’une mauvaise récolte et les produits non transformés sont partis à l'étranger (Vietnam, Inde, etc.). Les exploitants sénégalais ont fermé provisoirement, ils ont envoyé tout le personnel à la maison. Je trouve ça très triste, très dommageable et anti-économique. Il faut absolument créer des alliances entre transformateurs et producteurs. »


Pouvez-vous nous parler de l'événement du 7 février 2025 prochain, intitulé « Agriculture et Sécurité Alimentaire en Afrique » à l’Hôtel InterContinental Paris ?


« L'événement du 7 février prochain est très important, car il suit différentes manifestations. Vous en avez sans doute entendu parler, celle d’Addis-Abeba sur la faim et celle de Kampala en janvier. Toutes ces manifestations ont beaucoup d’importance, mais finalement, nous ne constatons aucun changement. Pour réussir à répondre aux divers objectifs, les pouvoirs publics doivent « mettre le paquet » et permettre l’intervention des grands groupes au sein de la transformation au pays et l’émergence du secteur des PME. Les objectifs fixés doivent aussi servir à sauver une partie des sur-récoltes, en stockant les produits pour ensuite les transformer au sein des unités de transformation. Ces dernières peuvent travailler jour et nuit lorsque c’est la période des récoltes. Ces unités doivent donc être à proximité des lieux d’exploitation. Ainsi, elles pourront gagner en logistique, gagner du temps en matière de transformation. C’est aussi pour cette raison que nous sommes pour la multiplication d'unités de transformation de taille moyenne, plutôt que de grandes usines. Celles-ci posent à la fois des problèmes énormes de financement, puis ensuite des problèmes de logistique. »


Si une PME souhaite entrer en contact avec AFA, quelle est la procédure à suivre ?


« Si une PME est intéressée, elle peut aller sur le site internet https://www.agrofinanceafrica.org/ et remplir un formulaire en ligne afin de nous expliquer ce qu’elle recherche en terme de financement. Sur le site internet, nous détaillons également ce que nous ne finançons pas. Nous expliquons également que la PME doit tout de même avoir 2 bilans comptables. Nous ne finançons pas les sociétés start-up, sauf lorsqu’il s’agit d'agriculteurs issus de coopératives. »




 
 
 

2 Comments


mickyboke224
Feb 03

C'est le produit local qui est fait dans nos pays africains.

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Lys Makima
Lys Makima
Feb 04
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C'est ce qu'il faut valoriser ! Merci pour votre commentaire.

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